RDC |TÉLÉCOMS : Avis consultatif du Conseil d’État du 9 février 2022 (RITE 045)

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1.  CONTEXTE

Le Conseil d’État de la République démocratique du Congo a rendu ce 9 février 2022 son avis consultatif motivé sous RITE 045 sur l’interprétation des dispositions des articles 201 et 202 de la loi n°20/017 du 25 novembre 2020 relative aux télécommunications et aux technologies de l’information et de la communication (Loi sur les télécommunications).

Le Président du collège de l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications du Congo (ARPTC) a saisi le Conseil d’État pour voir ce dernier donner son avis sur la question du maintien en activité de l’A.R.P.T.C en attendant la mise en place de l’Autorité de Régulation des Postes, des Télécommunications et des Technologies de l’Information et de la Communication du Congo (ARPTIC).

En effet, la Loi n°20/017 du 25 novembre 2020 relative aux télécommunications et aux technologies de l’information et de la communication, publiée par le Journal officiel dans son numéro spécial du 22 septembre 2021, a abrogé la Loi-cadre n°013/2002 du 16 octobre 2002 sur les télécommunications en République démocratique du Congo ainsi que la Loi n°014/2002 du 16 octobre 2002 portant création de l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications du Congo.

L’article 201 de la Loi n°20/017 du 25 novembre 2020 prévoit qu’en attendant la création de l’Autorité de régulation (ARPTIC) par décret délibéré en Conseil des ministres, l’ARPTC assure le rôle de régulation.

Cependant l’article 202 de la même loi sus évoquée, abroge la Loi n°014/2002 du 16 octobre 2002 portant création de l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications du Congo.

De cette contradiction, naît la question de savoir quel texte régira l’organisation, le patrimoine et le fonctionnement de l’ARPTC jusqu’à la création de l’ARPTIC.

2.  POINTS SOUMIS PAR L’ARPTC AU CONSEIL D’ÉTAT

La requête de l’ARPTC tendait donc à ce que le Conseil d’État puisse :

(i) préciser la portée exacte des dispositions des articles 201 et 202 sur les points de difficulté de leur interprétation à la lecture contradictoire qu’elles prêtent;

(ii) dire pour droit si la combinaison des articles 201 et 202 de la loi n°20/017 du 25 novembre 2020 relative aux télécommunications et aux technologies de l’information et de la communication devrait s’interpréter comme suit :

  • L’ARPTC continue  à  être  l’Autorité de régulation des Télécommunications, jusqu’à la création de l’ARPTIC, et à ce titre, elle agit avec ses statuts, ses organes, ses ressources et ses moyens de fonctionnement, tels qu’arrêtés par le décret n°012/15 du 20 février 2012 du Premier Ministre fixant les modalités de calcul et les taux des revenus des prestations de l’ARPTC, tel que modifié de temps à autre, et récemment par le décret n°20/005 du 9 mars 2020 ;
  • L’autorité réglementaire susvisée, à savoir le Premier Ministre, peut adapter en attendant le texte créateur de l’ARPTIC, par décret, les moyens de l’actuel ARPTC, eu égard aux missions ainsi confiées au régulateur par la loi nouvelle, aux projets et politiques menés ou à mener par le régulateur, pour ses besoins ou objectifs ;
  • dire pour droit si le maintien de l’ARPTC à titre transitoire dans les dispositions nécessaires et résiduaires de sa législation originaire diffère également le transfert de ses services entre le Président de la République, autorité dont l’ARPTC relève, et le ministre, autorité devant assurer la nouvelle tutelle légale sur l’autorité de régulation ARPTIC à créer ;
  • dire pour droit si les décisions de régulation que l’ARPTC pourraient prendre à l’égard du marché des télécommunications en attendant l’ ARPTIC, ainsi que les droits acquis qui pourraient découler d’un décret signé au profit du patrimoine de l’ARPTC en attendant l’ARPTIC, sont à préserver tant dans les futurs règlements subordonnés à intervenir en exécution de la loi n°20/017 qu’au moment du transfert de l’universalité du patrimoine de l’ARPTC à I’ ARPTIC, à l’instar du prescrit de l’article 221 de la Constitution.

La problématique de la tutelle de l’ARPTC pendant cette période transitoire ressort en filigrane des points soumis au Conseil d’État.

En effet, la Loi-cadre n°013/2002 du 16 octobre 2002 sur les télécommunications plaçait l’ARPTC sous la tutelle du Président de la République alors que la Loi n°20/017 du 25 novembre 2020 relative aux télécommunications et aux technologies de l’information et de la communication, place l’ARPTIC sous tutelle du Ministre des PT&NTIC.

La question de la tutelle de l’ARPTC a été mise en exergue lors du débat suscité par la gestion des revenus de la taxe sur le Registre des Appareils Mobiles (RAM)[1].

Interpellé à l’Assemblée nationale par une question orale en septembre 2021, le Ministre des PT&NTIC avait relevé que cette gestion relevait des organes de l’ARPTC que sont le Président qui est l’ordonnateur des dépenses, et le Collège qui adopte son budget et décide de son affectation. Le Ministre s’est donc justifié en écartant une quelconque responsabilité de sa part dans la gestion des revenus de la taxe RAM par l’ARPTC qui est placée sous la tutelle de la Présidence de la République.

3.  AVIS CONSULTATIF DU CONSEIL D’ÉTAT

Après avoir confirmé sa compétence à statuer ainsi que la recevabilité de la requête lui soumise, le Conseil d’État a opiné que :

(i)  Les articles 201 et 202 de la Loi n°20/017 du 25 novembre 2020 relative aux télécommunications et aux technologies de l’information et de la communication sont complémentaires.

(ii) L’article 201 de ladite Loi réaffirme la continuité de l’Autorité de régulation de la poste et des télécommunications du Congo, ARPTC en sigle, et maintient en vigueur la Loi n°014/2002 du 16 octobre 2002 portant création de l’Autorité de régulation de la poste et des télécommunications, en attendant sa suppression ou modification par voie réglementaire.

(iii) L’Autorité de régulation de la poste et des télécommunications continue à fonctionner et exerce toutes ses attributions. Elle applique la Loi n°20/017 du 25 novembre 2020 relative aux télécommunications et aux technologies de l’information et de la communication, jusqu’à la matérialisation par voie réglementaire du cadre institutionnel prévu par ladite loi.

(iv) Le sort de l’Autorité de régulation de la poste et des télécommunications du Congo, ARPTC en sigle, pour son fonctionnement, modification ou suppression, relève du pouvoir réglementaire, exercé selon le cas, par le Premier ministre ou le ministre chargé de ce ministère, en l’occurrence, celui des Postes, Télécommunications et Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication.

4.  CONCLUSION

Cet avis consultatif du Conseil d’État vient ainsi assainir les germes de conflits que portait l’interprétation des dispositions des articles 201 et 202 de la Loi sur les télécommunications.

En effet, l’interprétation contradictoire de ces deux articles a poussé certains acteurs du secteur à contester la compétence de l’autorité régulatrice sur plusieurs questions notamment celle d’infliger des sanctions en cas de violation de la Loi sur les télécommunications sous prétexte que l’ARPTC serait dépourvue d’existence juridique.

En dépit de cette position donnée par le Conseil d’État, il reste toujours impérieux que l’autorité réglementaire s’active pour doter l’autorité régulatrice d’un nouveau texte juridique devant régir son organisation et son fonctionnement.

_________________________________

[1] Pour rappel cette taxe a été instituée par le Décret n° 20/005 du 9 mars 2020 modifiant celui n° 012/15 du 20 février 2012 fixant les taux et modalités de calcul des revenus des prestations relatives à la certification des appareils mobiles suivant le système CEIR.

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